6 juin 2008 5 06 /06 /juin /2008 07:08
Richard Hell & The Voidoids - Blank Generation
Richard Hell & The Voidoids -
Blank Generation

(Sire 1977)


Personnage central de la scène punk de New-York, le chanteur et bassiste Richard Hell (de son vrai nom Richard Meyers) a eu un parcours atypique avant de sortir ce disque, accompagné par les Voidoids. En 1969, il forme avec Tom Verlaine, (un ancien collègue de lycée) le groupe The Neon Boys, qui deviendra quelques années plus tard Television. Richard Hell quitte le groupe après l'enregistrement des premières démos : à l'origine, T. Verlaine et lui devaient se partager l'écriture des morceaux, mais Hell a vite compris que son « ami » n'allait pas tenir parole.

 

Après une nouvelle période d'attente, pendant laquelle il a tenté de former un nouveau groupe, The Heartbreakers1, avec Jerry Nolan et Johnny Thunders qui venaient de quitter les New York Dolls, Richard Hell enrôle finalement les Voidoids, avec lesquels il va sortir un disque fondateur du punk new-yorkais. Malcolm McLaren, le manager (et tête pensante) des Sex Pistols, a reconnu à plusieurs reprises s'être inspiré de Richard Hell pour créer ce qui allait devenir l'esthétique punk (cheveux hérissés, vêtements déchirés, épingles à nourrice, etc.). Heureusement, ce disque est remarquable, avant tout pour la qualité de ses morceaux, et pas seulement pour l'imagerie punk naissante qu'il a contribuée à populariser. Blank Generation est en effet un des meilleurs albums de l'année, et comporte quelques-unes des meilleures chansons de punk-rock new-yorkais. « Love comes in spurts » est ainsi caractéristique des morceaux du groupe : rythmes syncopés, solos de guitare aberrants, et chant à l'abandon.

 

L'album est marqué par une foule d'influences diverses, depuis le romantisme désespéré de « In another world » («I could live with you in another world... Not this one ») au manifeste punk de la chanson-titre, dont les solos de guitare semblent avoir marqué Pete Doherty (« I belong to the blank generation / And I can take it or leave it each time »).

 

« New Pleasure », « Down at the Rock'n'Roll Club » et « Who says (it's good to be alive) » sont des chansons excellentes à l'influence rock prédominante, et qui rend définitivement inutile l'étiquette "punk" appliquée à des groupes aussi différents que Sex Pistols, Clash, Undertones, Buzzcocks, Dead Kennedys, Television et même Patti Smith ou Blondie. Les autres pistes proposent des styles divers : « Betrayal takes two » est un morceau plus calme, au son et aux paroles dégingandés ; quant à « Walking on water » et « The Plan », ils possèdent un lien de parenté évident avec Television.

 

L'approche directe de Richard Hell & The Voidoids a contribué à révolutionner le rock, qui se perdait entre prog-rock prétentieux et hard-rock (non moins prétentieux). Blank Generation a donc été un disque d'utilité publique, et continue à l'être : il propose une perspective intéressante sur les premières années de la scène punk de New York, et ses chansons restent efficaces et pertinentes, plus de trente ans après la sortie du disque.

 

 

 

 

 

Liste des chansons :


1. Love Comes in spurts *
2. Liars Beware
3. New Pleasure *
4. Betrayal takes two
5. Down at the Rock & Roll Club *
6. Who says (it's good to be alive) *
7. Blank Generation *
8. Walking on the water
9. The Plan *
10. Another World *
11. I'm you man
12. All the way

 

1Attention : The Heartbreakers est aussi le nom du groupe qui accompagnait Tom Petty, qui n'a aucun lien avec celui formé par Nolan, Hell et Thunders.

 

 

 

 

Vidéo :

 

"Blank Generation"


 
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15 mars 2008 6 15 /03 /mars /2008 09:48

Alice Cooper - Killer

Alice Cooper -
Killer

(Warner 1971)


  Alice Cooper apparaît en 2008 comme un vieux type bedonnant, aux yeux maquillés à la façon d'oncle Fétide, portant un marcel filet de pêche, un cycliste noir et la cape de Dracula. Et il chante du heavy metal lourdingue. Il est grand temps de mettre fin au cliché. N'oublions pas qu'avant de devenir ce croque-mitaines de carnaval, Alice Cooper n'était pas un chanteur, mais un groupe : The Alice Cooper Band. Bien sûr, celui qui s'appelait jadis Vincent Furnier était déjà spectaculaire sur scène, avec ses pythons, sa guillotine et sa tenue théâtrale, mais ce qui faisait parler avant toute chose était la qualité de sa musique.

  Repéré par Frank Zappa, le groupe a enregistré une paire d'album avant Killer, dont Love It To Death, peut-être son chef d'œuvre ultime. Cet album, tout comme celui au boa et les suivants ont été produits par Bob Ezrin, véritable pygmalion du groupe jusqu'à sa dissolution en 1974 (Ezrin continuera néanmoins sa collaboration ensuite avec le chanteur parti en solo). La collaboration entre ce génie du studio et le Alice Cooper Band sera une des plus fructueuse des années 70. Le deal était simple : "composez des bons morceaux, j'en ferai des chefs d'œuvre". A ce titre, Killer ressemble à un laboratoire de recherche pour Ezrin dont la production démente suscite à la fois l'admiration et la suspicion : le producteur n'hésite pas à en rajouter un max pour accentuer l'effet de certains passages : trompettes à tout va pour faire la fête et son de glas sépulcral pour ternir l'ambiance.

  A la sortie de Killer, le glam-rock est à son apogée, l'époque est au retour à un rock festif, à la dynamique et à la simplicité des fifties. Poussés par le succès de son précédent single "I'm Eighteen", le Alice Cooper Band décide de devenir un groupe glam rock'n'roll populaire. "Be My Lover" avec ses chœurs doo-wop sent la gomina à plein nez, "Under My Wheels" est tantôt génial avec son riff de guitare inimitable et horripilant avec les trompettes de big-band qu'Ezrin a cru bon ajouter, tandis que "Yeah, Yeah, Yeah" assume pleinement son rôle de pop song a moitié crétine. Cette approche dansante aura son effet immédiat : le groupe obtient enfin des tubes internationaux, comme l'inénarrable "Under My Wheels", aujourd'hui un des classiques du répertoire d'Alice, qui pourtant n'a aucun crédit pour ce morceau (écrit par le guitariste Michael Bruce, le bassiste Dennis Dunaway et Bob Ezrin).

  N'ayant pas complètement changé d'identité, le groupe propose toujours des morceaux contemplatifs, tels que l'immense "Desperado" aux violons envoûtants où Cooper rend hommage à Jim Morrison récemment décédé, et surtout le morceau "Killer", une longue jam de 7 minutes qui conclut l'album par une marche funèbre glaciale. Malgré tout, le véritable moment de bravoure de l'album – et de l'entière carrière d'Alice Cooper – n'est pas ce final magnifique mais un morceau placé en fin de face A, au moment pivot de l'album.

  "Halo Of Flies" demeure sans doute un des morceaux les plus dingues de l'histoire de la pop music. 8 minutes 22 de délire guitaristique et de mélodies à tiroir, une pièce en plusieurs mouvements qui surprend à chaque instant et mérite d'être placée au firmament des grandes excentricités du rock'n'roll. "Bohemian Rhapsody" – le mètre étalon en matière de rock épique – paraît bien sobre après ce "Halo Of Flies" tourbillonnant. De l'introduction bourdonnante aux premiers ralentissements, des riffs spectaculaires au cri de gorge d'un Alice déchaîné, ce morceau est à la fois sophistiqué, crétin, musicalement complexe et violemment rock'n'roll. Le batteur Neal Smith règne sur le morceau tandis que les guitares s'escriment dans des solos spectaculaires. Le groupe avouera plus tard avoir écrit cette pièce pour prouver au public que l'Alice Cooper Band n'étaient pas qu'un groupe de crétins déguisés. Message entendu, Killer est un des plus grands albums rock de cette décennie.




Tracklisting :

1. Under My Wheels
2. Be My Lover
3. Halo Of Flies  *
4. Desperado  *
5. You Drive Me Nervous  *
6. Yeah, Yeah, Yeah
7. Dead Babies  *
8. Killer  *




Vidéo :

 

 

"Under My Wheels"

 

 

 

 

 

 

Vinyle :

 

Le serpent sur la pochette s'appelait Kachina et appartenait au batteur Neal Smith, grand amateur de reptiles, qui s'occupait de la nourrir (oui, c'était une femelle). Alice l'utilisait sur scène.

Alice Cooper - Killer

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9 septembre 2006 6 09 /09 /septembre /2006 12:57

The Modern Lovers - The Modern LoversThe Modern Lovers
The Modern Lovers
 
(sortie Etats-Unis : 1976; sortie Europe: 1977)

 


    Au moment de sa sortie, ce disque était déjà vieux de plus de quatre ans. En effet, en 1972, Jonathan Richman (chant, guitare) et les autres Modern Lovers (Jerry Harrison à l'orgue, Ernie Brooks à la basse et David Robinson à la batterie) avaient enregistré quelques démos sous la direction de Kim Fowley. Les bandes furent ensuite confiées à l'ancien membre du Velvet Underground John Cale, qui va finalement produire cet album. Le disque n'est sorti qu'en octobre 1976 aux U.S.A. (et un an plus tard en Europe), à cause de nombreuses difficultés avec plusieurs maisons de disques (Warner, qui possédait les droits du disque, a refusé de le sortir, et après un court passage chez United Artists pour qui les Modern Lovers vont enregistrer un single, le groupe va finalement signer chez Beserkley, un label de la Côte Ouest qui va racheter les droits de l'album et – enfin – le publier).

 

    Dès les premières mesures, le son de l'album rappelle immédiatement celui des premiers Velvet. Fan inconditionnel de Lou Reed, Jonathan Richman semble lui emprunter son phrasé distant et ironique. Richman bénéficie en outre de la production impressionnante de John Cale, qui insuffle dans chaque chanson une tension et / ou une intensité comparable à celle(s) qu'on retrouve dans The Velvet Underground & Nico.

 

    La première chanson, "Roadrunner", pose les bases de l'album: batterie saccadée, guitares cinglantes, orgue assurant le fond sonore (ou la contre-mélodie), et le chant de Jonathan Richman, déclamant à la manière d'un Lou Reed nasillard. The Modern Lovers contient quelques morceaux extraordinaires; son Rock'n'Roll urbain accompagne des textes souvent excellents – et parfois minimalistes: "Some people try to pick up girls / And get called 'asshole' / This never happened to / Pablo Picasso"… Dans la chanson "Old world", Richman se laisse aller à la nostalgie d'une époque révolue: "I had a New York girlfriend / And she couldn't understand / How I could still love my parents / And still love the old world". Cette chanson est aussi remarquable pour son pont qui survient à mi-chanson, joué à la guitare et à l'orgue, et dont la réalisation est absolument improbable.

 

    "She Cracked" est sans doute le meilleur morceau de l'album : sur une rythmique enlevée (la batterie martèle le tempo, la ligne de basse est extraordinaire de simplicité et d'efficacité), deux guitares balancent des séries d'accords tranchants, s'entremêlent et accompagnent le chant. Un peu plus loin dans l'album, "Someone I care about" semble faire écho à ce morceau; la chanson est elle aussi excellente, son rythme est aussi élevé, et la formation emmenée par Jonathan Richman est impressionnante de maîtrise. Après "Girlfriend", un morceau qui ne paraît pas indispensable - et qui est malheureusement annonciateur de quelques-unes des futures créations de Richman – l'album se termine avec l'excellent "Modern world", qui fait écho à "Old world" de la face A: "Put down your cigarette and share the modern world with me".

 

    Les chansons proposées en bonus tracks de la réédition CD sont également très bonnes: "Dignified and old", un morceau lent imparable, et surtout "Government Center", une chanson aux textes amusants (le groupe doit jouer pour empêcher les employés de bureau de déprimer) sur laquelle la partie d'orgue est tout simplement géniale.

 

    Ce disque – le premier et le meilleur des Modern Lovers - est un excellent album, méconnu et à (re)découvrir d'urgence.

 

 

 


Tracklisting :
 


1. Roadrunner   *
2. Astral Plane *
3. Old World *
4. Pablo Picasso 
5. She Cracked *
6. Hospital 
7. Someone I Care About 
8. Girlfriend 
9. Modern World 
10. Dignified & Old 
11. I'm Straight 
12. Government Center *
13. I Wanna Sleep in Your Arms 
14. Dance With Me 
15. Someone I Care About [Alternative Version][Alternate Take] 
16. Modern World [Alternative Version][Alternate Take] 
17. Roadrunner [Alternative Version][Alternate Take] 

 

 

 

 

Vidéo :

 

"Roadrunner"


 

"Pablo Picasso"


 

 

 

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3 mai 2006 3 03 /05 /mai /2006 09:31

David Bowie - The Rise And Fall Of Ziggy Stardust And The Spiders From Mars

David Bowie -

The Rise And Fall Of Ziggy Stardust And The Spiders From Mars

(RCA 1972)

 

 

On ne peut que deplorer en France l'image deplorable que traine David Bowie aux yeux du grand public - qui n'est grand que l'ignorance bien souvent. Aujourd'hui, l'infame "Let's Dance", numero un en 1984, chante par un Bowie en perte de vitesse, reste la chanson a laquelle on associe encore le natif de Birmingham. Le clip ou on le voit bronze aux UV, ruisselant de transpiration avec les cheveux jaunes a la Doc Savage, demeure l'image par laquelle on se le represente. Si vous etes dans ce cas, l'achat de Ziggy Stardust releve de l'indispensable therapie a toutes ces images briseuses de mythes.

 

Ce disque est un exemple de perfection, une succession de perles a la beaute ecrasante et le point d'orgue d'un mouvement cree par Bowie lui-meme : le glam-rock. Avant Ziggy Stardust, Bowie fut un mod puis un hippie chevelu en robe ecrivant des pepites pop acoustiques. Avec ce disque, il engagea un groupe rock'n'roll (baptise The Spiders From Mars), coupa ses cheveux qu'il peint en orange (et crea a l'occasion - honte a lui - la mullet qu'affectionnent les fans de Johnny), se vetit de costumes affriolants a paillettes mettant en valeur son androgynie et se fit appeler Ziggy Stardust. Cette mutation, assortie de declarations tapageuses sur sa bisexualite, fit recette aupres de teenages en quete de porte-paroles et Bowie devint la plus grande star anglaise depuis les Beatles (sauf a domicile ou Marc Bolan etait intouchable avec T-Rex). Evidemment, tout cela n'aurait ete qu'une farce ridicule si l'album n'avait ete aussi bon.

 

A priori, avec tout ce tape-a-l'oeil et le concept inepte qui unit l'album (Ziggy est un extra-terrestre venu sur terre et il ne reste que 5 ans avant une catastrophe bla bla bla...), on pourrait s'attendre au pire. Il ne faut pourtant que quelques secondes et la magnifique introduction de "Five Years" pour comprendre qu'on a affaire a un disque special. La ferveur non feinte avec laquelle Bowie chante cette chanson pop imparable au tempo tranquille et aux accords de piano magiques est eblouissante. Enchainant par "Soul Love" puis le mythique "Moonage Daydream" (qui commence sur un riff lourd et le cri genial "I'm an alligator!", enchaine avec un groove puissant et se termine sur le meilleur solo de flute a bec qu'il vous sera donne d'entendre), Bowie touche a la perfection avec "Starman", chanson a la melodie extraordinaire qui figure parmi les chef d'oeuvre pop du 20eme siecle. Le non-initie sera heureux de reconnaitre la chanson d'une publicite recente. La face A s'acheve sur "It Ain't Easy", reprise d'un morceau obscur d'un certain Ron Davies, pretexte a des envolees guitaristiques mettant en avant le talent de Mick Ronson (par ailleurs responsable de l'arrangement sonore de tous les morceaux ici).

 

La face B commence par une ballade, "Lady Stardust", parfaite pour emballer sur un slow en 72, avant que le tempo n'accelere a nouveau par "Star" puis "Hang On To Yourself" ou le groupe montre qu'il sait envoyer un rock'n'roll rapide et nerveux. Car le rock, Bowie en connait un rayon. Il le prouve en creant le riff parfait - ultime diraient certains rock&folkeux - de "Ziggy Stardust" ou le personnage central du disque est celebre comme le messie. Cette chanson, blindee de references a des musiciens tels que Jimi Hendrix, est un de ces innombrables classiques ecrit par ce compositeur hors-pair.

 

Apres un autre numero endiable avec "Suffragette City", l'album s'acheve sur une note tragique, avec la magnifique "Rock'n'roll Suicide", aux lignes immortelles ("Time takes a cigarette/and puts it in your mouth") et une tension a la limite de l'insoutenable. La saga de Ziggy Stardust s'acheve avec son suicide dans un morceau semi-acoustique orne de violons et de cuivres. Un morceaux soufflant de beaute.


The Rise And Fall Of Ziggy Stardust est un des albums les plus influents des 35 dernieres annees, un des plus beaux aussi. Si vous cherchez la preuve que David Bowie est un des artistes majeurs du 20eme siecle, n'allez pas plus loin.

 

 

 

 

Tracklisting :

 

1. Five Years *

2. Soul Love

3. Moonage Daydream *

4. Starman *

5. It Ain't Easy *

6. Lady Stardust

7. Star

8. Hang on to Yourself

9. Ziggy Stardust *

10. Suffragette City

11. Rock 'n' Roll Suicide *

 

 

 

 

Vidéos :

 

"Five Years"


 

"Starman"


 

 

 

 

 

 

Vinyle :

 

La photo du recto, prise au 23 Heddon Street, à Londres, près de Piccadilly Circus.

 

David-Bowie---Ziggy.jpg

 

Le verso est célèbre pour son conseil d'écoute "To be played at maximum volume".

 

David-Bowie---Ziggy-back.jpg

 

 


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18 avril 2006 2 18 /04 /avril /2006 17:50

The Sex Pistols - Never Mind The Bollocks

The Sex Pistols -
Never Mind The Bollocks

(Virgin 1977)

 

Tout a déjà été dit à propos de cet album, alors pourquoi en parler? Parce que certains évoquent ce Never Mind The Bollocks comme étant le premier album punk ou le plus grand album punk de l'histoire. Il n'est pourtant ni l'un ni l'autre.

 

Si les Sex Pistols - formés de toutes pièces par le peu scrupuleux manager Malcolm McLaren - furent le premier groupe punk britannique et impressionnèrent The Clash et autres Buzzcocks au point de pousser ceux-ci à créer leur propre bande, ils ne doivent leur place dans la postérité que grâce à leurs frasques et leur réputation sulfureuse. Les Sex Pistols sont dans l'histoire du punk les méchants, ceux qui ont constamment eu tort - et donc raison. Un seul désir : choquer, à tout prix. Pour ce faire, on porte des croix gammées, des fringues déchirées et des coupes de cheveux colorées, on se comporte de façon outrancière à la télévision, on véhicule une image de violence et on chante des hymnes anarchiques ("Anarchy In The UK") et anti-royalistes ("God Save The Queen"). En 1977, le bourgeois modèle flippait grave devant les hordes d'iroquois en cuir qui menaçaient de tout casser. Les punks adoraient les Sex Pistols, jusqu'à la dévotion. Les deux singles cités plus haut ont rendu soudainement les choses possibles pour tous les gosses désoeuvrés d'Angleterre, libérant leur violence et leurs instincts d'auto-destruction. L'idéal punk était né.

 

Le systême aura néanmoins rapidement raison des Sex Pistols. L'album met d'abord une éternité pour sortir, conséquence du rejet du groupe par le label et du départ de Glen Matlock, bassiste, qui se fait virer au profit du fan dégénéré Sid Vicious. Le split final de ce groupe éphémère interviendra à peine quelques mois plus tard, avant la valse de l'horreur véhiculée par Vicious (qui assassine sa copine avant de mourir d'overdose) qui fascine aujourd'hui les kids en mal d'icone.

 

Seul reste comme témoignage des dizaines de souvenirs d'ancien combattants, quelques films et ce disque clé. Si le son n'a pas vieilli, la répétitivité des morceaux tous basés sur la même structure et la lassitude que génère l'incessant numéro de pantomime du chanteur Johnny Rotten nous empêche de penser qu'on tient là un des chefs d'oeuvre du 20e siècle. Le disque est correct, sans plus, mais demeure indispensable à toute collection pour l'unique présence de "God Save The Queen" et "Anarchy In The UK", les autres chansons important peu (allez on donnera une mention spéciale à "Pretty Vacant" quand même).

 

De toute façon l'intérêt du groupe ne se situe pas là, tant ce qu'ils représentent compte plus que leur musique. Comme le disait Oscar Wilde à propos de lui-même, les Sex Pistols ont mis leur talent dans leur art et leur génie dans leur vie. Si leur génie - ou celui de Malcolm McLaren, c'est comme vous voulez - est certain, leur talent reste à démontrer.

 

 

 

Tracklisting :

 

1. Holidays In The Sun

2. Bodies

3. No Feelings

4. Liar

5. God Save The Queen *

6. Problems

7. Seventeen

8. Anarchy In The U.K. *

9. Submission

10. Pretty Vacant

11. New York

12. E.M.I.

 

 

Vidéos :

 

"Anarchy In The UK"

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21 mars 2006 2 21 /03 /mars /2006 17:39

Lou Reed - TransformerLou Reed

Transformer
(novembre 1972, RCA)

 

    Transformer est le deuxième album solo de Lou Reed. Le premier, intitulé sobrement Lou Reed, était sorti en juillet de cette même année (1972), et si quelques-unes des chansons confirmait la capacité de l'ancien leader du Velvet Underground à composer des morceaux somptueux, la production de l'album laissait à désirer. A deux exceptions près, toutes les  chansons avaient déjà été écrites – et même jouées – avec le Velvet (pour leurs versions originales, se reporter à l'extraordinaire V.U., sorti en 1985 ; et à Another View, sorti l'année  suivante –  nettement moins bon).

 

    Pour Transformer, la production est assurée par David Bowie et Mick Ronson, qui, en ce début de décennie, transforment tout ce qu'ils touchent en or. Depuis le début de l'année 1970, Mick Ronson est le guitariste attitré de Bowie. Son style caractéristique, fait de riffs tranchants et efficaces, a défini le jeu de guitare Glam (au même titre que celui de Marc Bolan). De plus, le natif de Hull est l'auteur – et l'arrangeur – des parties de violon pour Hunky Dory (décembre 1971) et Ziggy Stardust (juin 1972), albums sur lesquels il joue aussi du piano.

 

    Le travail de production et les arrangements effectués par Bowie et Ronson apportent à Lou Reed ce qui a manqué à son premier album solo; un son limpide qui met parfaitement en valeur les compositions. Le résultat: Transformer est un très bon album pop, presque un classique dès sa sortie (le disque se classe dans le top 30 en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, alors qu'aucun album du Velvet Underground n'avait pénétré dans les charts). "Vicious", dont le jeu de guitare fait date, ouvre l'album de façon magistrale. Tout l'album est parsemé de chansons glam-rock, bien plus proches des deux derniers albums de Bowie que des albums du Velvet, qui forment l'armature glam-rock de Transformer. Pour chacune de ces chansons ("Vicious", "Hangin' 'Round", "Make Up", "Wagon Wheel", "I'm so free"), la guitare acérée de Mick Ronson fait le travail, avec un son aggressif et efficace.

 

    La plupart des autres chansons sont des ballades où Lou Reed promène sa voix tranquille, posée ("Perfect Day", "Walk on the wild side", "Satellite of Love"). Les arrangements, toujours signés Bowie et Ronson, sont appliqués, précis, et laissent la part belle au chanteur et à ses textes. Avec Lou Reed, les textes, même ceux des chansons qui paraissent inoffensives, sont toujours d'une qualité indiscutable, truffés de doubles sens, comme sur "Perfect Day" ("Just a perfect day, you made me forget myself, I thought I was someone else, someone good") ou sur "Andy's Chest" ("Well you know what happens after dark / When rattlesnakes lose their skins and their hearts / And all the missionaries lose their bark…"). Pour "Walk on the wild side", une histoire du voyage d'un travesti en auto-stop à travers les Etats-Unis, Lou Reed  met en scène divers personnages, croisés quelques années plus tôt dans la Factory d'Andy Warhol, sur une ligne de basse aussi répétitive qu'inusable…

 

    Transformer est l'album qui place Lou Reed sur le devant de la scène Pop-Rock, une position qu'il quittera délibérément l'année suivante, avec le très intimiste Berlin (1973). Même s'il peut rebuter quelques fans du Velvet Underground - finie l'avant-garde rock expérimentale, place au glam et à la pop, Transformer est un excellent disque, la référence pop de la discographie de Lou Reed.

 

 

 

 

Tracklisting :

 

  1. Vicious *
  2. Andy's Chest *
  3. Perfect Day *
  4. Hangin' 'Round
  5. Walk On The Wild Side *

  6. Make Up
  7. Satellite Of Love *
  8. Wagon Wheel
  9. New York Telephone Conversation
10. I'm So Free
11. Goodnight Ladies

 

L'album sur Deezer : www.deezer.com/fr/#music/lou-reed/transformer-108072

 

 

 

 

Vidéos :

 

"Walk On The Wild Side" (live 1974)




"Vicious"





Vinyle :

 

 

 

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16 juin 2005 4 16 /06 /juin /2005 22:00

Television - Marquee Moon

Television

Marquee Moon
(Elektra 1977)

 

 

A l'heure où le nom de Television ressort dans chaque interview de groupe de rock à guitare lorsqu'arrive la question des influences, il convient de revenir sur ce groupe aussi important qu'éphémère. Classé au rayon punk pour avoir sorti leur premier album en 1977 et fait leurs classes au mythique club new-yorkais CBGB, Television ne ressemblent en rien à tous les groupes de leur époque. Durant les huit morceaux que contient Marquee Moon on assiste à un duel de guitaristes – Tom Verlaine et Ricard Lloyd – sur une rythmique sèche (ses détracteurs reprochent à cet album son manque de groove). Certes, le batteur a un jeu très limité, et si la basse – malgré des lignes tortueuses – ne claque pas comme elle le devrait, c'est pour mettre en avant le jeu de guitare extraordinaire de ce groupe à deux solistes.

 

Surdoués de la six-cordes, Verlaine et Lloyd envoient l'album vers des sommets et tutoient le sublime sur la face A du vinyl original. "See No Evil" est une entrée en matière idéale où le groupe étale sa classe sereinement (est-ce punk?) et où Verlaine chauffe sa voix étranglée avant de passer la seconde avec "Venus". Le solo de cette dernière est une merveille de production (est-ce de la guitare? du synthé? Les deux?) . L'intensité monte encore avec un "Friction tendu où le bassiste se réveille enfin et où les gratteux s'enflamment. Le riff qui porte la chanson est extraordinaire et tous les sens sont en éveil pendant ce morceau où les guitares se faufilent comme des serpents. Chaque écoute de ce morceau révèle de nouveaux secrets grâce aux inspirations géniales des duettistes.

 

Arrive "Marquee Moon", morceau de bravoure de dix minutes. Envoyant le punk dans les cordes, Television se frotte au jazz sur cette pièce à l'intensité incroyable, montant de minute en minute et où un petit riff génial revient régulièrement narguer l'auditeur. Verlaine et Lloyd ont chacun le droit à leur solo, l'un répondant à l'autre et le poussant dans ses derniers retranchements pour ce qui est certainement la plus grande baston de guitare jamais enregistrée. Le tout s'achève de concert par une explosion finale où on touche au sublime. Silence. La batterie revient, le morceau repart pour s'achever posément. La grande classe. La face B est globalement moins bonne – disons qu'elle est moins intense (on y trouve plusieurs ballades "Guiding Light", "Torn Curtain" et une sorte de reggae "Prove It"). Peu importe, la seule face A suffit à classer cet album au panthéon du rock.

 

Bien entendu, le groupe ne s'est jamais remis du succès critique de Marquee Moon et a splitté peu après un deuxième album forcément décevant. Le prix à payer pour un tel chef d'œuvre.

 

 

 

 

 

 

Tracklisting :

1. See No Evil

2. Venus   *

 

 

3. Friction   *

 

4. Marquee Moon  *
5. Elevation

 

6. Guiding Light
7. Prove It
8. Torn Curtain

 

 

 

 

 

 

Vidéos :

 

Le morceau "Marque Moon" en intégralité. Un des morceaux les plus importants de l'histoire du rock.

 

 

 

 

 

Vinyle :

 

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