23 mars 2008
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The Black Keys -
Attack & Release
(Nonesuch Records – V2 ; 2008)
Ce disque est le cinquième de Dan Auerbach (guitare et chant) et de Patrick Carney (batterie), qui enregistrent depuis 2002 des disques de Blues hallucinants. Aussi productif qu’excellent, ce duo a enchaîné les albums implacables, en conservant l’approche lo-fi et la démarche minimaliste de ses débuts. Il y a quelques mois, le groupe annonçait vouloir enregistrer avec Danger Mouse, qui est bien crédité en tant que producteur sur ce disque. Depuis quelques années, ce dernier est un des producteurs les plus demandés de la scène pop (en plus de son immense succès avec Gnarls Barkley, il a produit Gorillaz, The Good The Bad And The Queen, et va s’occuper du prochain album de Beck). Surpris par cette collaboration, c’est avec un peu de fébrilité et beaucoup d’impatience que l’on commence l’écoute d’Attack & Release.
Dès les premières notes, le changement est manifeste : « All you ever wanted » lance le disque de façon douce ; le rythme est lancinant, on entend une guitare acoustique, une guitare électrique et un orgue, en plus de l’inévitable batterie. Ce morceau est différent de tout ce que le groupe avait produit auparavant ; d’abord surprenant, il apparaît rapidement comme une grande chanson. « I got mine » est plus proche du style du groupe, même si le pont qui arrive à mi-chanson montre une volonté de surprendre : pendant plus d’une minute, le morceau s’affranchit totalement de sa construction, avant le retour implacable de la guitare électrique qui reprend le riff de départ. En deux morceaux, le groupe a rendu ridicules les craintes qu’on pouvait avoir. « Strange Times » possède une ampleur de son impressionnante qui devrait convaincre la plupart des auditeurs, et en surprendre quelques autres – la rythmique est gonflée, des sons étranges surgissent, l’orchestration s’enrichit encore.
On pourrait affirmer avoir été choqué par cette avalanche de moyens mis en place – dont les premiers rythmes de « Remember When (side A)», une ballade blues chargée d’arrangements divers, et dont la fin se situe aux antipodes des morceaux traditionnels des Black Keys. La seule chose qui empêche de s’offusquer, et qui est absolument indiscutable, c’est que les chansons sont excellentes. « Remember when (side B) » est le morceau le plus direct du disque : un riff efficace, une batterie implacable, un solo parfait, et la voix d’Auerbach qui entraîne le tout sur deux minutes. Dans la partie « références aux anciens », on note le début de « Same old thing », qui rappellera sans doute Jethro Tull aux plus de soixante ans, et Henry Thomas aux plus de cent-vingt ans, et l’arpège de départ de « So he won’t break », qui semble faire écho à Led Zeppelin.
Les choses sont claires : le duo a décidé d’abandonner l’approche minimaliste qui était leur marque de fabrique depuis 2002 ; les Black Keys ont enregistré pour la première fois dans un vrai studio. Après écoute du disque, on peut conclure qu’ils en ont pleinement profité, en choisissant de s’ouvrir à des influences diverses : cette volonté s’est traduite par la participation de Jessica Lea Mayfield, une chanteuse de bluegrass d’à peine 18 ans, mais aussi celles de deux musiciens occasionnels de Tom Waits ; Mark Ribot et Ralph Carney (ce dernier se trouvant être l’oncle du batteur des Black Keys).
Heureusement, le fait de ne pas avoir changé de label – et donc d’être resté chez le géant V2 pour ce disque – et la démarche plus ambitieuse du groupe n’a pas détruit cet exceptionnel duo de l’Ohio. Carney et Auerbach transpirent toujours le Blues, leur talent est toujours là, et si quelques-unes des chansons sont moins directes et agressives qu’à l’accoutumée, Attack & Release possède plusieurs morceaux qui laissent les Black Keys loin au-dessus de la mêlée des groupes actuels.
Le dernier morceau du disque, « Things ain’t like they used to be », est une ballade blues périlleuse sur laquelle le groupe de Carney et Auerbach confirme sa mue. Avec Attack & Release, les Black Keys ont surpris, mais ont remporté leur pari difficile qui était de conserver l’identité du groupe et d’enregistrer un bon album, en se donnant les moyens d’une ambition nouvelle.
(Nonesuch Records – V2 ; 2008)
Ce disque est le cinquième de Dan Auerbach (guitare et chant) et de Patrick Carney (batterie), qui enregistrent depuis 2002 des disques de Blues hallucinants. Aussi productif qu’excellent, ce duo a enchaîné les albums implacables, en conservant l’approche lo-fi et la démarche minimaliste de ses débuts. Il y a quelques mois, le groupe annonçait vouloir enregistrer avec Danger Mouse, qui est bien crédité en tant que producteur sur ce disque. Depuis quelques années, ce dernier est un des producteurs les plus demandés de la scène pop (en plus de son immense succès avec Gnarls Barkley, il a produit Gorillaz, The Good The Bad And The Queen, et va s’occuper du prochain album de Beck). Surpris par cette collaboration, c’est avec un peu de fébrilité et beaucoup d’impatience que l’on commence l’écoute d’Attack & Release.
Dès les premières notes, le changement est manifeste : « All you ever wanted » lance le disque de façon douce ; le rythme est lancinant, on entend une guitare acoustique, une guitare électrique et un orgue, en plus de l’inévitable batterie. Ce morceau est différent de tout ce que le groupe avait produit auparavant ; d’abord surprenant, il apparaît rapidement comme une grande chanson. « I got mine » est plus proche du style du groupe, même si le pont qui arrive à mi-chanson montre une volonté de surprendre : pendant plus d’une minute, le morceau s’affranchit totalement de sa construction, avant le retour implacable de la guitare électrique qui reprend le riff de départ. En deux morceaux, le groupe a rendu ridicules les craintes qu’on pouvait avoir. « Strange Times » possède une ampleur de son impressionnante qui devrait convaincre la plupart des auditeurs, et en surprendre quelques autres – la rythmique est gonflée, des sons étranges surgissent, l’orchestration s’enrichit encore.
On pourrait affirmer avoir été choqué par cette avalanche de moyens mis en place – dont les premiers rythmes de « Remember When (side A)», une ballade blues chargée d’arrangements divers, et dont la fin se situe aux antipodes des morceaux traditionnels des Black Keys. La seule chose qui empêche de s’offusquer, et qui est absolument indiscutable, c’est que les chansons sont excellentes. « Remember when (side B) » est le morceau le plus direct du disque : un riff efficace, une batterie implacable, un solo parfait, et la voix d’Auerbach qui entraîne le tout sur deux minutes. Dans la partie « références aux anciens », on note le début de « Same old thing », qui rappellera sans doute Jethro Tull aux plus de soixante ans, et Henry Thomas aux plus de cent-vingt ans, et l’arpège de départ de « So he won’t break », qui semble faire écho à Led Zeppelin.
Les choses sont claires : le duo a décidé d’abandonner l’approche minimaliste qui était leur marque de fabrique depuis 2002 ; les Black Keys ont enregistré pour la première fois dans un vrai studio. Après écoute du disque, on peut conclure qu’ils en ont pleinement profité, en choisissant de s’ouvrir à des influences diverses : cette volonté s’est traduite par la participation de Jessica Lea Mayfield, une chanteuse de bluegrass d’à peine 18 ans, mais aussi celles de deux musiciens occasionnels de Tom Waits ; Mark Ribot et Ralph Carney (ce dernier se trouvant être l’oncle du batteur des Black Keys).
Heureusement, le fait de ne pas avoir changé de label – et donc d’être resté chez le géant V2 pour ce disque – et la démarche plus ambitieuse du groupe n’a pas détruit cet exceptionnel duo de l’Ohio. Carney et Auerbach transpirent toujours le Blues, leur talent est toujours là, et si quelques-unes des chansons sont moins directes et agressives qu’à l’accoutumée, Attack & Release possède plusieurs morceaux qui laissent les Black Keys loin au-dessus de la mêlée des groupes actuels.
Le dernier morceau du disque, « Things ain’t like they used to be », est une ballade blues périlleuse sur laquelle le groupe de Carney et Auerbach confirme sa mue. Avec Attack & Release, les Black Keys ont surpris, mais ont remporté leur pari difficile qui était de conserver l’identité du groupe et d’enregistrer un bon album, en se donnant les moyens d’une ambition nouvelle.
Liste des chansons :
1. All you ever wanted *
2. I got mine *
3. Strange Times *
4. Psychotic Girl
5. Lies
6. Remember when (side A)
7. Remember when (side B) *
8. Same old thing
9. So he won’t break
10. Oceans & Streams
11. Things ain’t like they used to be
Vidéo :
"I Got Mine"