The Coral -
Singles Collection
(Deltasonic 2008)
Un best-of de The Coral en 2008 ? Pourquoi pas après tout. Si le prolifique groupe de Liverpool n'a d'existence discographique que depuis 2002, il possède déjà à son actif 5 albums parfaits et une cinquantaine de faces B d'une qualité renversante. Au moment où le groupe revient au premier plan grâce à la promotion incessante qu'en on fait Alex Turner et Miles Kane à la sortie de l'album des Last Shadow Puppets, le label Deltasonic a décidé de compiler les singles du groupe pour capitaliser sur la hype du moment. Cette décision discutable (quoique soutenue par le groupe qui souhaite tourner la page Bill Ryder-Jones1) nous vaut aujourd'hui un album double, le premier disque de compilation étant agrémentée d'un deuxième CD de morceaux inédits qui en rend l'acquisition indispensable.
Il n'y a pas grand dire quant au premier album, habilement compilé, qui alterne les morceaux les plus emblématiques du groupe dans une incroyable orgie de mélodies intemporelles. Ce disque là supporte la comparaison avec n'importe lequel des best-of de vos groupes sixties préférés. Le fan pointilleux regrettera seulement qu'il y a tromperie sur la marchandise : "Liezah" n'est jamais sorti en single et les deux premiers EP du groupe sont absents ("The Oldest Path", et le beefheartien "Skeleton Key", un grand manque ici car la face psychédélique du groupe n'est que très peu représentée sur cet album). En dernier morceau de ce best of figure l'inédit "Being Somebody Else", enregistré à l'époque de Roots & Echoes, une ballade classieuse dans la lignée de "Jacqueline". Un vrai bonheur.
Le deuxième CD est la raison pour laquelle les fans du groupe doivent absolument se ruer sur cet album. The Coral ont ouvert la boîte de Pandore au risque d'amputer leur futur album de morceaux superbes : au milieu d'une poignée de prises live, de reprises et de démos, le groupe nous gratifie 8 morceaux inédits, jamais publiés en face B, jamais apparus sur des sites de téléchargement illégaux. Quasiment un album entier de matériel.
Passons sur les démos, qui ont le même inintérêt archéologique que le premier album de l'Anthology des Beatles. On se doutait qu'à 17 ans ces gens avaient déjà beaucoup de talent, mais écouter des démos de "Shadows Fall", "Calendars & Clocks" et "Dreaming Of You" tirées d'un magnétophone souffreteux n'apporte pas grand-chose. A l'inverse, la présence de la version originale de "Siamond Diamond" est appréciable tant ce morceau demeure un classique du répertoire du groupe, tout comme cette version délicate de "Cobwebs". Les prestations live du groupe sont tout aussi délectables, notamment "Far From The Crowd" et ce "She's Got A Reason" maîtrisé, dont il est quasi impossible de différencier la version live de la version album, ce qui est assez surprenant. Si la reprise de "Reward" des Teardrop Explodes pêche par un son digne d'un bootleg, celles, excellentes, de "Bye Bye Love" des Everly Brothers et de "Everybody's Talking" de Fred Neil, sont révélatrices de la lignée dans laquelle le groupe veut se placer, celle des songwriters de grande classe. Mieux que des grands discours, les morceaux inédits tant attendus viennent appuyer cette revendication : la tendre "Michael's Song", la BO de western spaghetti de "When All Birds Have Flown", l'ambiance vaudou de "Monkey To The Moon" ou le British beat de "Return Her To Me" sont autant de gemmes taillées par The Coral. Combien d'autres chefs d'œuvres de ce genre dorment encore dans une armoire ?
Quand on voit la qualité des morceaux mis de côté par le groupe - ils ne sont ni sur l'album, ni en face B, ce sont donc des morceaux de 3ème catégorie (!) -, on a une pensée pour The Kooks, Stereophonics, Bloc Party et tous ces groupes indigents qui suent pour accoucher d'une demi-chanson acceptable et de 12 morceaux de remplissage. Comme le dit Carl Barât, "the world was at their feet but they didn't give a toss"2. The Coral sont le groupe anglais qui distribue la meilleure came depuis 2002 et ils se foutent de toute forme de célébrité. Ils avancent sans se soucier des modes (ni de leur public d'ailleurs, mais c'est un autre débat). Leur discographie compte aujourd'hui plus d'une centaine de morceaux. On ne saurait en citer un qu'on déteste.
The Coral n'ont jamais écrit une mauvais chanson, même quand ils avaient 17 ans et qu'ils s'enregistraient dans leur chambre d'adolescent (certains groupes tueraient pour "It's In Your Hands"). Il y a de quoi écœurer la concurrence. Ce best of multiplie les instants de bonheur et devrait satisfaire les fans les plus acharnés. Les néophytes risquent de ne jamais s'en remettre. Peut-être ce disque leur vaudra-t-il la reconnaissance qu'ils méritent tant.
Tracklisting :
CD 1 * 1. Dreaming Of You 2. In The Morning 3. Pass It On 4. Don't Think You're The First 5. Jacqueline 6. Secret Kiss 7. Goodbye 8. Shadows Fall 9. Liezah 10. Whos Gonna Find Me 11. Bill Mccai 12. Put The Sun Back 13. Something Inside Of Me 14. Being Somebody Else | CD 2 1. When The Birds Have Flown * 2. Golden Bough 3. Michael's Song * 4. Cry Of The City * 5. Everybody's Talking At Me * 6. Far From The Crowd (Live) * 7. She's Got A Reason (Live) 8. Return Her To Me 9. Monkey To The Moon * 10. It Was Nothing 11. Cobwebs 12. Simon Diamond (version EP) * 13. Shadows Fall (Instrumental) 14. Calendars And Clocks (Demo) 15. Seagulls 16. Dreaming Of You (Demo) 17. It's In Your Hands 18. Reward (Live) 19. Bye Bye Love (Live) |
Vidéo :
"Being Somebody Else" :
Vinyle :
La version vinyle de cette compilation est un triple album extrèmement classieux.
1 le guitariste Bill Ryder-Jones a quitté le groupe en début d'année 2008. James Skelly a affirmé que ce best of lui avait permis de reprendre confiance en lui après les tourments de cette séparation et de tirer un trait sur le passé.
2 laissez-moi le temps de fouiller dans ma pile de NME et je vous trouverai la citation exacte.